The blue-footed boobie

Ben oui, comme promis il y a déjà quelque temps, et comme nous sommes aux Galapagos, nous allons parler ici du fou à pattes bleues: une autre de ces rubriques scientifiques qui forcent universellement le respect et l’admiration pour ce blog de très haute tenue.

Le fou à pattes bleues (blue-footed boobie, in english) est un fou. Facile. Comme le fou de Bassan bien de chez nous. Mais il a les pattes bleues, et il est endémique, et emblématique, des Îles Galapagos. Du moins, c’est ce qu’on lit dans les bons guides sur les oiseaux marins. Et c’était vrai jusqu’à il y a peu, avant la découverte incroyable d’une autre espèce de fou à pattes bleues.

Nous allons donc logiquement démarrer cette rubrique par l’étude du fou à pattes bleues de Kousk Eol, qui comme son nom l’indique, est lui endémique de l’environnement représenté par ce seul voilier. L’espèce est malheureusement inexorablement en voie de disparition: en effet, un seul exemplaire serait encore aperçu de temps à autres, lors de certaines pleines lunes, à mi-marée par brise de SSE et léger brouillard, aux alentours de l’équateur, après quelques ti-punch, voire pisco sour. Tout comme pour le yéti, seuls quelques très rares privilégiés peuvent se targuer de l’avoir admiré. Heureusement pour la science et la postérité, l’un de ces privilégiés a eu la présence d’esprit de prendre une photo de ce spécimen, seule photo connue à ce jour.

FouPattesBleuesLE fou à pattes bleues de Kousk Eol

On reconnaîtra sans mal sur cette photo les fameuses pattes palmées bleues et tous les attributs propres à la catégorie des fous: yeux hagards que la plus minuscule lueur d’intelligence n’a jamais éclairés, sourire béat et satisfait, posture improbable…
Vous n’êtes pas sans savoir que le fou plonge pour assurer sa pitance. Et donc on pourra remarquer sur cette photo les préparatifs minutieux du fou à pattes bleues, juste avant l’ingestion du mélange « Spécial Grandes Profondeurs », en vue d’une plongée dans les eaux turquoises autant qu’insondables du Pacifique (Accompagnement musical en prime: bande son du « Grand Bleu », ta ta ta!), et très poissonneuses grâce au courant de Humboldt .
On notera aussi les effets de l’évolution sur cette espèce et en particulier son côté aptère: les ailes ont disparu pour laisser la place à des membres ressemblant vaguement à des bras. En effet, l’espace étant confiné sur Kousk Eol, point besoin de voler. De plus, une aile n’aurait été d’aucune utilité pour attraper le verre de ti-punch (ou de pisco sour, mais on l’a déjà dit). Il est trop fort, ce Darwin.

Nous étant interrogés sur le silence et l’immobilisme des instances naturalistes internationales, il nous fut répondu que malgré l’unicité de la représentation de cette espèce certes fort attachante, le monde devait se réjouir de cet état de fait: le bougre est bien seul, mais sacrément résistant. Et il n’est pas évident que d’autres représentants de l’espèce soient forcément souhaitables. Nous comprîmes rapidement qu’un comité de soutien du fou à pattes bleues de Kousk Eol n’était donc pas à mettre à l’ordre du jour…
Encore un animal mythique, qui, tel le dahu, finira dans les recueils de contes et légendes pour enfants qui croient encore au Père Noël.

Le fou à pattes bleues des Galapagos est quant à lui beaucoup plus banal. Comme nous le disions plus haut, c’est un bête fou. Bien sûr, tous les poncifs s’appliquent: le fou est un bel oiseau, très élancé, bon planeur et sacré plongeur. Mais pourquoi venir jusqu’aux Galapagos pour l’admirer? Bien plus près de chez nous, les Sept Îles offrent le spectacle grandiose de dizaines de fous à bien moindre prix… Et vous pouvez toujours essayer de trouver du kouign-aman aux Galapagos, après avoir admiré les acrobaties de ces magnifiques oiseaux!
Chauvinisme? Meu non: pure objectivité.

D’accord, aux Galapagos, comme les fous sont des chochottes, qu’ils ont du temps et qu’il y a plein de touristes pour les admirer, ils se peignent les pattes en bleu. C’est sûr, ça donne un genre. C’est vaguement original… Mais c’est bien connu, les goûts et les couleurs, ça ne se discute pas. On vous met malgré tout quelques photos afin que vous puissiez juger par vous-mêmes:

fou02Le fou à pattes bleues des Galapagos

Le fou bleu n’a aucune personnalité: au bout de trois minutes, on arrive à lui faire lever la papatte comme un vulgaire toutou:

fou04« Donne la papatte au monsieur! »

Jaloux du cormoran, fier pêcheur lui aussi, il essaie de lui copier sa façon de faire sécher ses ailes:

fou05Cormoran fou?

Bon d’accord, en fait, il paraîtrait, aux dires de certains prétendus experts, que ces pitreries auraient simplement pour but d’emballer la jeune femelle qui dandine dans le coin, aux pattes bleues elle aussi…

fou06Mesdames, seriez-vous séduites, vous?

Bref, on est bien d’accord: foncez aux Sept Îles, et utilisez Photoshop si vous tenez vraiment aux pattes bleues…

Autre petite vidéo montrant les fous entrain de pêcher…

 

Note: suite à une demande expresse du comité de rédaction, l’auteur certifie-hic être complètement à jeun, éthyliquement parlant, l’ultime bouteille de carmenere ayant perdu son combat contre l’équipage il y a belle lurette et le dernier pisco sour ayant été relégué au rayon des vagues et lointains souvenirs.

Les Galapagos: San Cristobal

San Cristobal est la première île que nous visiterons, la plus à l’Est, avec la capitale administrative de l’archipel, Puerto Baquerizo Moreno, port d’entrée aux Galapagos pour les formalités.

Darwin
Darwin omniprésent

Fait peu connu, les habitants de Puerto Baquerizo sont majoritairement les otaries à fourrure des Galapagos, très mignonnes et peu farouches.

Le bord de mer de la cité semble être leur territoire exclusif. La petite plage qui donne sur le port dans la ville est envahie dès le soir par environ 2000 de ces charmants mammifères, parents et enfants.

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Otaries sur la plage de Puerto Baquerizo, la nuit.

OtariesGalapagos02 OtariesGalapagos03 OtariesGalapagos04Otaries sur les bancs publics…

OtariesGalapagos07Otaries toujours…

On trouve bien aussi quelques autres espèces animales dans la ville, surtout une sorte de bipède habillé de façon colorée, semblant échanger des propos incompréhensibles pour nous avec leurs congénères et buvant des bières: l’inadaptation au milieu naturel paraît flagrante. Cette espèce ne devrait pas survivre longtemps, si Darwin ne s’est pas trompé.

Le mouillage est relativement bien organisé. Un service de taxis aquatiques, que l’on contacte par VHF (canal 14), vous emmène pour $1 par personne.

La «ville» elle-même est vite visitée. La vie est très centrée sur le tourisme: petits hôtels, restaurants, quelques boutiques et des agences pour les tours en bateau à tous les coins de rue.
L’approvisionnement de l’île dépend en grande partie du continent: un cargo apporte l’essentiel presque toutes les semaines. San Cristobal n’a pas à se plaindre: c’est la seule des îles à être autosuffisante en eau douce.

Le 8 avril, MarieJo et Cathy nous rejoignent: avion à Baltra, île/aéroport au Nord de Santa Cruz, ferry/bus jusqu’à Puerto Ayora au Sud de l’île, puis deux heures de petite vedette jusqu’à Puerto Baquerizo, dans une houle dure. Nous récupérons nos épouses un peu « cassées »…

Pour avoir un aperçu de l’île, nous prenons un taxi pour faire un tour dans San Cristobal: une belle et unique route d’environ 25 km en taxi permet de se faire une idée.

Premier stop: le lac El Junco dans un cratère de volcan à 700m d’altitude. Spectacle irréel des frégates venant se rincer les ailes dans l’eau douce avant de retourner vers la mer…

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Frégates

Deuxième stop: la Galapaguera , pouponnière à tortues géantes, afin de repeupler l’île. En effet, il était de bon ton à une certaine époque de massacrer ces animaux, menacés aussi par les espèces intrusives importées par les colons. Les jeunes tortues qui sont nées ici y restent six ans avant de retourner dans la nature! Mais bon, elles vivent plus de 150 ans.
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Tortues géantes

Troisième stop: la plage de Puerto Chino, belle plage de sable blanc, fin. Les otaries viennent nous tourner autour. Mais où nous ne verrons pas les fous à pattes bleues cette fois…

CLAU4045 (1280x960)CLAU4795 (1280x848)Iguanes marins

Les plages autour de la ville sont aussi testées: Playa Baquerizo, la Loberia … L’eau est chaude, et la faune toujours présente et aussi peu farouche.
Les restaurants varient du simple au triple, les moins chers étant les restaurants pour Galapagueños: $5 à $7 pour un repas complet avec soupe, plat principal et boisson. Les menus sont simples: pratiquement tout est importé.

Nous avons prévu de reprendre le bateau le 13 avril pour Puerto Villamil: traversée d’environ 80 milles.

Les Îles Galapagos

Putain de sujet! Rappelez-vous la guéguerre entre créationnistes et évolutionnistes: vous rendez-vous bien compte que c’est là que l’évolutionnisme a gagné ses galons? Que c’est un géant parmi les géants qui a rendu célèbres les Galapagos? Donc ça donne un peu des frissons de vouloir parler de cet archipel autant connoté…

Les deux frangins, vous le savez depuis le temps qu’on vous le rabâche, se la pètent dès que l’occasion se présente. Et se la péter comprend entre autre de se regarder le nombril, occupation ô combien gratifiante. C’est bien là que les créationnistes ont tout faux: il aurait fait comment, Adam, lui, pour se regarder le nombril dans son paradis personnel, si Darwin n’était pas passé par là?

Eglise-Evolution
L’évolutionnisme avant Darwin

Mais revenons à notre sujet: les Galapagos.
Nous arrivons donc par l’île de San Cristobal, la plus à l’Est, et la capitale administrative de l’archipel, Puerto Baquerizo Moreno, port obligé pour les formalités d’entrée. Nous mouillons sur ancre, au milieu d’une demi-douzaine d’autres voiliers, dans une anse devant la ville.

Je ne veux pas juger de l’administration équatorienne, mais une chose est sûre: elle n’est pas plus légère qu’ailleurs, pour faire dans l’euphémisme… Nous devons passer par un agent qui s’occupe de ces formalités, et nous ponctionne de $ 1500!
“Réception”, calculée en fonction du tonnage (et de l’âge du capitaine?);
$ 100 pour les services d’inspection sanitaire;
$ 40 pour l’immigration;
$ 100 par personne pour les droits d’entrée dans le parc;
$ 10 par personne pour le Conseil Gouvernemental;
$ 30 par copie des documents;
$ 40 pour la récupération des ordures;
$ 25 pour l’inspection de la coque;
$ 100 pour l’inspection par les autorités du parc;
$ 150 pour la fumigation et l’élimination des nuisibles (et on ne parle pas ici des deux frangins);
$ 500 pour les émoluments de l’agence (et ses trois représentants sur les trois îles);
Plus ce que j’ai oublié, entre autre l’autografo… L’autografo est l’autorisation de mouiller dans trois ports différents, sinon on reste coincé dans le port d’arrivée. Il se demande un mois avant l’arrivée.

Et le lendemain ,nous avons la visite à bord d’une dizaine de fonctionnaires: Armada, Immigration, Inspection Sanitaire, Parc, Douanes, plus un ou deux autres dont nous n’avons pas bien compris le rôle. On a même un inspecteur qui plonge pour vérifier la propreté de la coque: heureusement que nous l’avions grattée la veille, sous le regard attentif des otaries! Finalement, Kousk Eol est déclaré apte à naviguer dans les eaux du parc.

Apparemment, les autorités équatoriennes durcissent les mesures chaque année un peu plus, entre autre pour les voiliers. Le tourisme de masse, arrivant par avion, semble plus facilement contrôlable et ponctionnable. Il semblerait qu’il y ait de moins en moins de voiliers au fil des ans: environ 300 cette année tout de même. Mais bon, les Galapagos sont un sanctuaire à protéger, et il faut trouver un équilibre avec le business lié au tourisme, non négligeable (240 000 touristes l’an dernier, alors que l’archipel compte environ 24 000 habitants, dont un peu plus de la moitié sur Santa Cruz.

Nous aurons l’autorisation de mouiller dans trois ports, pas un de plus: Puerto Baquerizo, Puerto Ayora sur l’île de Santa Cruz, et Puerto Villamil sur l’île Santa Isabela. Point. Interdiction de se balader autour des îles: il faudra prendre les transports locaux,et donc lâcher quelques dollars de plus (entre $80 et $130 la ballade à la journée…). Et à chaque changement de port, il faut demander un zarpe (autorisation), et payer $15 au port de départ et $15 au port d’arrivée… Tarif double le week-end.
En effet, tout se paie ici, et tout est vite cher… Et tout se paie en dollars, monnaie officielle de l’Équateur.

En fait, difficile de comprendre vraiment ce qui est autorisé de ce qui ne l’est pas… Nous rencontrerons des voiliers arrivés directement à Puerto Villamil (malgré l’absence de service d’immigration)… Les tarifs semblent aussi varier selon des critères qui nous ont un peu échappé (hormis le fait de ne pas demander d’autografo, et donc de rester dans un seul port). Certains bateaux ne restent que 48h, limite en deçà de laquelle rien n’est demandé…