Donc, disais-je, nous arrivons sous le rocher de la discorde britannico-espagnole lundi 14 novembre 2022.
L’objectif principal de la journée, je vous le rappelle, est de satisfaire le désir d’Eric d’un fish’n’chips. Il aurait soit-disant dégotté un resto à côté de Main Street qui devrait nous convertir à la cuisine traditionnelle britannique… Nous demandons à voir. Parce que Kousk Eol a ses habitudes dans un pub un peu plus loin…
Vers 16h30, douché de frais, l’équipage s’élance d’un pas conquérant vers Gibraltar, à un petit quart d’heure de la marina. La frontière est franchie sans problème. Rappelez-vous : juste après celle-ci, il faut franchir la piste de l’aéroport. Mais quand il y a un avion prêt au décollage, ben il faut attendre… C’est évidemment ce qu’il nous arrive.
L’attente n’est pas trop longue, et nous pouvons entamer la soirée par un apéro (léger) sur le waterfront local. Où Eric continue à nous vanter1 les vertus du fish’n’chips du Vinopolis Gastrobar : il faut dire qu ‘avec un nom pareil…
La terrasse est plutôt sympa, tout comme le service. Ainsi que le vin espagnol. Enfin arrive le mets tant attendu. Bon, il faut bien le dire, c’est plutôt pas mal pour des Anglais… Même les frites sont bien cuites. Il va me falloir beaucoup de mauvaise foi pour les convaincre d’essayer l’Angry Friar, car, évidemment entre mâles prétendus dominants, il est hors de question de dire que ce fish’n’chips est le meilleur. On verra ça demain !
The top of the Rock
Le lendemain donc, mardi 15, le programme est de monter sur la crête du Rocher. Et ça commence mal : la rue, raide, que nous prenons est fermée. Il faut donc faire demi-tour et aller prendre une autre route raide un peu plus loin.
Nous arrivons finalement à la Ohara’s Battery, dont le canon domine le détroit. Les côtes d’Afrique paraissent toute proches, malgré le ciel couvert.
Vue sur l’Afrique depuis la batterie O’Hara qui surveille le détroit.
Puis nous remontons vers le nord et l’arrivée du téléphérique. La vue sur la baie d’Algésiras est magnifique. Quelques singes ne daignent même pas nous regarder passer.
La baie d’Algésiras vue du haut.Des fois, il y en a qui coulent…Sur la crête.La DRH de Kousk Eol interviewant des candidats équipiers sachant monter au mât…
Nous redescendons vers Main Street par les escaliers du Charle’s V Wall, qu’il faut partager avec les macaques qui se prélassent sur les marches étroites. Il faut savoir que ces animaux ont d’impressionnantes canines qui nous incitent à la prudence en les croisant !
Parfois, il faut négocier le passage…660 marches à descendre…
Il est plus de 13 heures lorsque nous sommes en bas : juste à temps pour la deuxième phase de l’essai comparatif. Direction The Angry Friar, lui aussi crédité du meilleur fish’n’chips du coin. On va voir ce qu’on va voir. La bière, une pinte chacun, est bonne et fraîche : désaltérante à souhait après nos presque 4 heures de marche. Puis arrive LE plat. Et là, déception : très peu à voir avec le plat d’hier… Frites mal cuites et poisson plutôt graisseux… Mais il ressemble plus aux fish’n’chips que l’on trouve dans un papier journal sur les quais des ports anglais. Plus authentique, koâ. Mais malgré toute la mauvaise foi dont je peux être capable2, le verdict est sans appel : Eric a gagné. Il faut le retenir avant qu’il ne monte sur une table pour danser et exprimer sa joie de compétiteur dans l’âme3.
Puis repus et fatigués, nous rentrons au bateau pour une petite sieste avant quelques courses pour le soir, et commencer à se faire peur avec la météo. Au fait, Eric a eu des crampes d’estomac tout l’après-midi… Petite nature ! Mais le ti punch a effacé tout ça, et on a eu droit a une dernière salve d’autosatisfaction sur le choix des restos.
La rédaction (vous savez, les deux frangins qui se la pètent), ne reculant pas devant la dépense pour tenter de satisfaire les exigences toujours plus inaccessibles de son lectorat, n’a pas hésité cette fois à carrément s’adjoindre un grand reporter pour relater la balade des valeureux marins vers les Açores sur leur vaillant coursier. Ce chapitre majeur de la vie de Kousk Eol est donc confié à Tonio. Bonne lecture !
18 mai 2017 Ça y est, on peut le dire cette fois-ci : « On y va » ! Il ne s’agit plusmaintenant d’aller faire des courses, d’une excursion en montagne ou sur une plage, de larguer des amarres pour aller mouiller sur le récif un peu plus loin, non, là c’est la grande annonce, c’est la phrase qu’on ne réentendra pas avant d’avoir touché terre à nouveau, aux Açores.Car à partir de maintenant Kousk Eol ne s’arrêtera plus – du moins si les vents sont cléments avec nous.
L’équipe de choc…
Avant la mer.
En effet jusqu’ici, les premiers jours d’acclimatation pour les quatre métropolitains qui ont rejoint le bord pour épauler André ont été jusque-là plutôt orientés vers un cabotage plaisant que la vraie navigation. Un peu un moyen de bien charger les batteries avant la grande aventure. Et pour cela rien de tel qu’un petit mouillage en face d’une plage paradisiaque sur l’ile de Marie-Galante la belle. La traversée a tout de même été un peu rude, face au vent et houle secouante, mais cela permet de prendre la mesure de ce qui nous attendra sûrement plus tard, et de tester pour les débutants (Tom et Tonio) nos connaissances et notre résistance.
Malheureusement, nous ne sommes pas tous égaux face au mal de mer, et les premiers signes d’intolérance à la houle apparaissent. Après une traversée de quatre heures et demie environ de la marina de Pointe-à-Pitre vers Marie-Galante, le spectacle redonne vie et envie à tous, même au plus malade d’entre nous. Moment magique partagé par tous, pêche aux langoustes, repas délicieux, apéro ti punch partagé à bord avec nos voisins de marina de la veille, les marins du bateau Sirius, tout se présentepour le mieux.
Studieuse préparation…
Le lendemain matin, après un petit bain dans l’eau cristalline et unevirée sur la plage, le tour de KouskEol est fait afin de ranger tout ce qui sera superflu pour la suite : entre autres l’annexe, la table à apéro – mais je vous rassure pas l’apéro en lui-même. En arrivant la veille au mouillage on avait tout de même constaté un problème électronique concernant certains appareils de bord, mais nous décidâmes de vérifier cela le lendemain.
Putain d’électronique! Si je tenais le Glaude…
Il s’avère que l’on a dû tripatouiller tout le circuit de connectique des principaux appareils (et donc de littéralement retourner tout le rangement qui avait été fait la veille à la marina) afin de finalement localiser à peu près ou se situait le problème, de débrancher ce qui était source de conflit, et de ne garder que le pilote automatique qui reste le principal ami de ceux qui aiment se reposer la nuit. Plus de profondeur, plus de speedo, ni de répétiteurs. Au final on s’en passe très bien jusqu’àprésent, on verra pour la suite. Et nous voilà donc partis à treize heures trente, rassurés, car André s’était bien gardé de se prononcer sur sa décision pour la suite (doit-on rentrer réparer à la marina, ou peut-on partir ainsi) avant d’avoir le cœur net sur la situation. Un grand bravo à Nico qui s’est plié en quatre pour accéder aux branchements situés en fond de coffres, et au capitaine Dédé pour son calme et sa vision d’ensemble. Petit à petit, Marie-Galante s’éloigne, puis Grande-Terre à notre gauche apparaît et disparaît, Petite-Terre à tribord nous fait parler et rêver (ce sera pour une prochaine fois pour ceux qui ne connaissent pas), la Désirade et sa forme de plateau surélevé nous salue alors que finalement nous passons le cap de la Pointe des Châteaux.Bientôt, plus de terre à l’horizon.
Adieu la Guadeloupe!
Cette fois, c’est la bonne, c’est le départ, c’est sûr.
19 mai 2017 Les premières vingt-quatre heures de navigation ont été rudes. Un bon vent de face, au près (c’est un des mots qu’on a durement appris à bord), mais une houle chaotique laissant peu de chance d’acclimatation aux novices dont je fais partie. La nuit a été longue et peu reposante, le bateau claquant et secouant de toutes parts. Encore une fois, cela ressemble à une mise à l’épreuve de la mer, nous rappelant que nous n’y sommes que des passagers et qu’il ne s’agirait pas de la sous-estimer. Chacun fait du mieux pour s’accrocher comme il peut, estomacs compris, sauf bien sûr le (vieux) loup de mer Dédé ainsi queNico qui sont plus habitués que les autres (je les soupçonne d’avoir quand même un peu souffert en silence). Celui qui s’en tire le plus mal, c’est Thomas : l’amarinage prend du temps, la première journée l’ayant vraiment secouée. Pas drôle, et rester en cabine à l’horizontale est parfois la seule façon d’attendre que ça passe, si ça passe. Moi aussi cette nuit je me suis demandé alors que je me faisais balader dans toutes les directions autour de ma couchette « Mais dans quelle galère tu t’es embarqué mon vieux ? », imaginé tout et l’inverse, bref, le moral un peu secoué. Le lendemain, les conditions se sont bien calmées, on fait le point, ça ne devrait plus être aussi mauvais, ce qui nous redonne de l’appétit au sens propre comme figuré.
L’horizontalité est un concept particulier à bord e Kousk Eol…
Les jours suivants se déroulent merveilleusement, malgré le faible vent qui ne nous permet pas de suivre un itinéraire logique. On va donc les trois prochains jours imprimer une ligne tout ce qu’il y a de plus erratique sur l’écran de navigation, en partant un coup vers l’est, un coup vers l’ouest, se retenir presque parfois de devoir faire un demi-tour, et sortir comme dit précédemment toutes les voiles à bord une par une et selon toutes les combinaisons possibles, afin d’essayer de s’en tirer au mieux, le tout en essayant d’aller au nord pour chercher Eole. Vous aurez remarqué que le style du blog a du bien changer par rapport aux écrits de Claude, technicien et linguiste hors-pair, pour ma part je me concentrerai sur l’expérience humaine et moins sur la voile car mes connaissances en ce domaine sont limitées (mais on y travaille !). D’autre part, nous avons une véritable équipe de journalistes à bord, l’un vidéaste l’autre photographe, nous essaierons donc d’illustrer ce blog en profitant du vieil adage qui dit qu’une image vaut mille mots.
23 mai 2017 – 4h Il y a des moments oùl’on se rend vraiment compte que l’on est au milieu de l’océan, et pour cela rien de tel qu’un quart qui démarre à quatre heures du matin, juste avant le lever de soleil. Le fin croissant de lune, bordé de son étoile unique – lui ayant fait la conversation des dernières heures de nuit avant de filer – laisse place petit à petit aux couleurs chaudes de notre étoile de vie, le soleil.
Juste avant le premier quart.
Un oiseau se détache du creux d’une vague presque inexistante en ce petit matin (peu de vent et pas de houle, donc nuit de sommeil agréable), et cercle autour du KouskEol.Lui aussi profite de la vue, ou alors s’intéresse au bateau et à ses deux occupants dans le cockpit. Ces oiseaux solitaires, volant à plusieurs centaines de miles des cotes, ont le caractère des marins qui prennent le large pour se retrouver seuls au milieu de ce bleu infini. Celui-ci par exemple a-t-il déjà vu un humain ? En attendant impossible en ce petit matin de trouver le bon coup de vent qui nous amènera dans notre direction souhaitée.On file quasiment vers l’ouest, direction la Floride, alors que nous cherchons à remonter vers le nord, voire partir vers l’est dès que possible pour se jeter dans les premièresdépressions de l’Atlantique Nord. Coincés donc. L’itinéraire de ces quatre derniers jours, depuis que nous avons quittés Marie-Galante, est erratique. Bonentraînement pour les novices de la voile puisque du coup nous déployons tous nos moyens pour tenter de remonter, alors que le vent s’amuse à nous tourner autour. Prendre et lâcher les ris environ une cinquantaine de fois, rentrer la trinquette pour sortir le génois pour le ré-enrouler tout de suite après (fois dix, jusqu’à lui trouver sa place), déployer le code D tout beau tout violet (enfin un peu de couleur dans ces voiles), donc finalement rien d’anormal pour celui qui cherche en permanence les meilleures conditions. Et il faut dire que Dédé connaît bien son bateau. On ne la lui fait pas, même quand il est dans les bras de Morphée ou sur le trône, le moindre écart de barre et on entend une voix qui s’élève du fond du carré : « Tu lofes trop, abats ! » ou encore « Reprend les 10° que tu viens de perdre »… Tout ça avec beaucoup de patience bien sûr. C’est qu’il est quand même content d’être là avec ses deux fistons, André.
Manœuvres à bord.
Donc pour en revenir à notre itinéraire, les conditions font que nous faisons route vers le nord – cap sur les Bermudes – afin d’aller chercher les bonnes conditions de vent qui nous permettront de piquer à l’est dès que l’on atteindra la zone intermédiaire entre l’anticyclone des Açores et les dépressions du nord. Bon rien de nouveau pour ceux qui connaissent la traversée de l’Atlantique dans ce sens, donc nous ne nous étendrons pas plus sur le pourquoi du comment.
Il a même fallu récupérer la drisse de grand-voile à cause d’une manille qui a lâché…
Suite du voyage
Et voilà le virage a été pris vers l’est, les conditions de vent le permettant enfin. Le tracé de route jusque-là n’a pas été linéaire, les manœuvres non plus, mais considérons cela comme de l’entraînement.
Les quelques jours de pétole qui se sont enchaînés les quatre premiers jours ont présenté l’avantage de pouvoir pécher, avec dans l’ordre : une tête de poisson arrachée, un barracuda de 18 kg qu’on rejettera (ciguatera oblige), une petite bonite, suivi d’une dorade coryphène (mai-mai) qui nous rassasia de sashimi et de bon ceviche. Après cela, plus rien ne sera péché à part algues, physalies et un capot de jerrican (gros espoir pour Antoine qui pensait avoir pêché sa première prise), à croire que l’océan est vide.
On mange quoi, ce soir?
Sashimis dans le sloop! Oui je sais: déjà fait, mais je n’ai pas pu me retenir…
Donc une fois lancés vers le grand large, un vent de 15-20 nœuds de sud-ouest qui nous porte, on retrouve des conditions de navigation plus adéquates à notre espoir d’arriver dans les premières estimations de dates aux Açores. Même si le ralentissement du début avait été anticipé, nous n’avons plus de temps à perdre. La notion du temps se perd petit à petit, et sans journal de bord à mes côtés au moment ou je vous écris, je n’ai plus d’idéeprécise de ce qui s’est fait et à quel moment. Dans le désordre donc, nous avons eu : une baignade au milieu de l’océan, des repas festifs et des repas répétitifs (ne nous parlez plus de plats au riz), des quarts longs et des quarts faciles, des nuits chaudes et des nuits froides, de la mer clémente et de la mer agitée, des grands moments de rien et du grand enthousiasme, et je vous laisse imaginer la suite des faits et leurs opposés.
Déserteur pris sur le fait.
Pêche au gros.
Au niveau de l’équipage, l’ambiance est très bonne, chacun vaquant selon ses envies et capacités, Dédé et Nico évidemment plus compétents que les autres même si Raph sort largement son épingle du jeu par rapport à Thomas et moi.
À propos de Thomas, pour lui ça ne se passe pas fort : malade depuis la première sortie entre Point-à-Pitre et Marie-Galante, il ne s’en remettra pas. Sans s’attarder sur son calvaire, il passera dix-$1 jours malade allongé sur sa couchette et tentant quelques sorties lors des moments de mer plate, ajournés dès que la houle se relèvera. Malgré cela Thomas a fait preuve de force de caractère en restant positif en documentant son mal grâce à sa Go–pro face à laquelle il a tenu un journal de bord (de cabine?) ; peut-être aurons-nous accès à toutes ses confidences et états d’âme s’il les publie un jour ? Les quarts se déroulent par créneaux de 3h30 au début (DD, Nico, Raph & Antoine ensemble), puis raccourcis grâce au fait qu’on me fait l’honneur de m’offrir un quart pour moi tout seul… On passe donc à des quarts de 2h30, ce qui n’est pas plus mal. Vive les quarts sous les tropiques : il fait chaud, la nuit est absolument magnifique, l’air est relativement sec. Les quarts à partir du milieu de l’Atlantique sont humides à souhait et l’air se rafraîchit rapidement (la mer aussi)… Petite pensée pour ceux qui ont traversé dans les eaux froides de l’hémisphère sud. Nous avons croisé peu de bateaux à voile lors de notre traversée, et beaucoup de cargos (avec quelques échanges de VHF comiques à souhait, dont le fameux indien-pakistanais qui nous dit « Don’t worry, I monitor you. » depuis son cargo de 300 m), vigilance oblige. En ce qui concerne les voiliers, petite anecdote concernant nos amis bretons de Sirius (nos anciens voisins de marina à Point-à-Pitre, puis revus à Marie-Galante pour le mouillage et l’apéro à bord du KouskEol), nous les recroiserons après quatre jours de pétole au début. Lesapercevant au loin, contents de voir un navire, nous les voyons se rapprocher jusqu’à les reconnaître.Pensant qu’ils viennent à notre rencontre nous nous préparons à les saluer, mais, lorsqu’ils passenttrente mètres derrière nous, personne à la barre… Tom siffle, et là quatretêtesémergent de la cabine en catastrophe, se demandant qui siffle au milieu de nul part. Au moteur depuis quelques heures, ils filaient en fait en ligne droite vers l’est pour sortir de ce plat mortel, et faisaient la sieste… À peu de chose près ils nous seraient rentrés dedans ! Les recroisant plus tard aux Açores, nous auront largement le temps de les chambrer là-dessus, autour d’un petit punch à bord leur bateau.
Encounter of the 3rd type…
Notre autre voisin de traversée fut le catamaran Jesovico, avec Eric & Eric à bord (plus un mousse). Là aussi, quelques échanges de VHF, pendant lesquelles DD et Éric nous auront démontré leur grande capacité à se dire… ben pas grand-chose. « Jesovico, Jesovico, Jesovico pour Kousk Eol, KouskEol, KouskEol… alors Éric… Ça va ? Bon on a un vent un peu faible… » Eric : « Oui André, tout à fait… nous avons… un vent… un peu faible… » DD : « Alors heu… quelques vagues hein ? » Eric : « Eh bien, oui… quelques vagues en effet André »… DD : « Bon il fait pas très beau hein ? » Éric : « ah oui André, il ne fait pa très beau… » DD : « Bon et bien Éric, content de t’avoir parlé, à plus tard… » Éric : « Oui on se reparle plus tard… over ». Bon, on dira que c’est la forme qui compte et pas le fond quand on se sent un peu seuls en mer. En tous cas, ça fera une bonne blague pour tout l’équipage qui en rigole encore.
Y paraitrait que c’est pas des poissons et qui faut pas les manger…
Et voilà, que vous dire de plus ? Gros vents par la suite, manœuvres à gogo du DD qui nous fait tout sortir voile par voile pour les replier tout de suite après (quand y a pas de vent, y a pas de vent…), car au final la bonne combine c’est quand même grand voile et génois qui marcheront tout du long… Avec quelques embardées, rattrapages de courbes, calculs d’itinéraires, et tout ce qui fait la joie des navigateurs et les besoins d’une traversée. Arrivée très tôt aux Açores après avoir tenté de décider la veille si nous voulions arriver de jour ou de nuit : ayant pris la décision d’arriver de nuit, nous arriverons de jour… L’anticipation a ses limites en mer.
Nous aurons traversé en un peu plus de seize jours: pas mal pour des débutants!
C’était : KouskEol vu par Tonio. Prochain épisode : le repos bien mérité sur L’île de Faial.
A bientôt.
Lundi 13 mars 2017, 18h45. L’annexe est remontée à bord et pliée, les courses rangées, l’ancre rangée à poste et nous voici partis pour le plus long tronçon de notre croisière du Cap à Fort de France. Nous tablons sur une quinzaine de jours : le vent sera variable, et il y a le pot au noir à franchir.
Pour l’instant, nous avons un petit dix nœuds de sud-est ; nous reprenons nos bords de grand largue, pas forcément sur la route, mais bien plus confortables que le vent arrière. La lune est pleine et illumine la nuit.
Loxodromique vs. Orthodromique
Le lendemain matin, comme la météo l’avait prévu, le vent est toujours d’est-sud-est, autour de douze nœuds : il ne faudra pas le gaspiller si nous voulons tenir nos prévisions ! Je vous fais grâce des discussions à propos de la VMG, sujet déjà largement abordé dans de précédents chapitres. Par contre, deux mille milles, ce n’est pas rien. Doit-on bêtement suivre la loxodromique, ou doit-on plutôt s’aligner sur l’orthodromique ? Je vous entends d’ici : « Qu’est-ce qu’il dit ? ». Deux mots d’explication. Vous n’avez pas été, j’en suis sûr, sans remarquer qu’une carte digne de ce nom, terrestre ou marine, est un morceau de papier plan, comme si on avait mis notre globe à plat. Et jusqu’à preuve du contraire, nos géomètres experts et autres topographes n’ont pas encore tout à fait réussi à faire que la représentation plane soit complètement juste, surtout sur de grandes échelles. Par exemple, les méridiens et les parallèles, des arcs de cercle, sont en général représentés par un quadrillage de droites qui se coupent à angle droit. À l’échelle d’un pays comme la France, où beaucoup d’autres choses sont tordues, ça ne pose pas trop de problème. À l’échelle d’un océan, l’approximation peut devenir plus dure à avaler : regardez pour vous en convaincre la taille et la forme du continent antarctique.
Quand on trace une route, par exemple entre le Cap de Bonne Espérance et Fort de France, sur une carte, la ligne en principe droite coupera tous les méridiens avec le même angle. Essayez de tracer l’arc le plus court qui va entre les mêmes points sur un globe : les méridiens ne sont plus coupés avec le même angle…
Ah ! Donc il y a une différence entre ces deux routes : la première, sur carte plane, s’appelle la loxodromique, alors que la deuxième, la plus courte, s’appelle l’orthodromique. Oui, d’accord, mais alors comment tracer une orthodromique sur une carte plane ? Ben, ça dépend de la transformation utilisée pour avoir une représentation plane du globe, le système géodésique. Comme il n’y a pas que des Normands à naviguer (ou à lire ce chapitre), cette réponse peut sembler un peu courte… En fait, tous les logiciels de navigation, dont l’excellent, et gratuit, OpenCPN, vous traceront automatiquement une orthodromique à partir de votre bête loxodromique, et vous diront même combien de milles vous gagnerez à la suivre ! Les petits malins qui ont un tant soit peu suivi auront noté que si la route suit un méridien ou un parallèle, loxodromie et orthodromie sont confondues.
La route en rouge (Orthodromique) est plus courte que la route en vert (Loxodromique).
Bon : ce sera tout pour aujourd’hui, je sens qu’il y en a qui commencent à fatiguer, dans le fond.
Et Kousk Eol, alors, il fait quoi, lui ? Dans la pratique, comme nous sommes sur un voilier, il est très rare que le vent tienne compte de ces considérations : la route suivie sera la plus proche de l’orthodromique, mais largement dépendante de la direction et de la force d’Éole… C’était juste histoire de raconter quelque chose qui paraisse pour une fois un peu intelligent au milieu de cette accumulation de poncifs à la banalité désolante…
Mardi 14 mars. 13H30. Tout allait bien jusque-là. Pendant que certain est en plein stage de réinsertion conjugale, les forçats de Kousk Eol suent à grosses gouttes à ne rien faire sous n’importe quel coin d’ombre. Tranquilles. Et puis tout d’un coup, fin de la récré : « J’ai une touche ! J’ai une touche ! Tout l’équipage, à l’aide ! ». Le Payou nous sort un joli rainbow runner de quatre kilos. Comme le dit avec justesse la sagesse populaire, si vous sashimisez1 sur le vrai pêcheur, vous rirez des sushis ! En tout cas, ce soir, sashimis dans le sloop!
Les sashimis ne sont qu’à une portée de baguettes!
Bon : j’ai de nouveau remisé la boite de confit de canard. Mais je les aurai !
Doll Drums
Nous approchons doucement de l’équateur. Le temps change. La température aussi. Fini l’alizé régulier. Le vent devient capricieux avec les passages de nombreux nuages à grain. C’est le pot au noir, les doll drums des Anglo-saxons. La Zone de Convergence Inter Tropicale des météorologues. La région de basses pressions coincée entre l’anticyclone de l’Atlantique Nord (le fameux des Açores) et celui de l’Atlantique Sud. La ZCIT oscille autour de l’équateur, plus ou moins large, et le temps y est très perturbé. Les gros nuages noirs chargés d’eau sont légion. Le vent, faible ou inexistant, monte brusquement autour de trente nœuds à leur passage : il faut jongler avec l’enrouleur pour réduire la toile à temps. C’est le moment pour l’équipage de sortir le liquide dégraissant : nous commençons à prendre de vraies douches, avec les premières pluies dignes de ce nom depuis le Cap.
La stratégie est simple : se sortir de la ZCIT le plus vite possible ! Et aller récupérer l’alizé de l’Atlantique Nord, plus fort et mieux orienté d’après les GRIBs. Du coup, nous piquons un peu plus au nord, avec l’aide du moteur quand le vent nous lâche. Heureusement, le courant est favorable et nous pousse vers l’ouest. Bientôt nous serons à nouveau dans l’hémisphère nord, que nous avions quitté il y a plus de trois ans.
15 mars, 10h30 : l’équateur est à une centaine de milles sur notre route. Comme à l’aller, nous allons le passer de nuit… Entre temps, nous profitons d’un peu de répit : le vent est maintenant au nord-est, établi autour de douze nœuds. Nous avançons au bon plein2, à plus de six nœuds sur une mer plutôt calme. Quelques gros grains passent de nouveau, cassant ce bon rythme. Nous sommes même obligés de mettre le moteur quelques heures : le vent et tombé et les voiles claquent. Nous en profitons pour refaire le plein d’eau douce, ce que nous n’avions pu faire à Fernando de Noronha.
Ce soir, nous arrivons finalement à manger ce qui était prévu de longue date : confit de canard du sud-ouest, accompagné de ses délicates patates de St Hélène et de quelques patates douces brésiliennes de Fernando de Noronha cuites dans la graisse dudit canard, finement épicées de poivre du Sarawak. Pour le dessert : petits babas au rhum à la fleur de sel de Guérande. Une tuerie sans douleur préparée avec un savoir-faire sadique par le Comptoir de Mathilde (Publicité gratuite), qui vous fait basculer dans le délit de gourmandise sans vous en rendre compte. Rien de tel pour faire passer le pot au noir.
16 mars, six heures dix-sept (8h 17′ 46ʺ UTC, et 35°56′ W) : Kousk Eol navigue à nouveau le mât en l’air ! Après plus de trois ans dans l’hémisphère sud, nous voici de retour chez nous ! Malgré l’heure, la coupette de champagne est de rigueur, sans oublier Poséidon.
Rencontre du mauvais type.
Le vent devrait passer progressivement au nord-est, ce qui arrangerait bien nos affaires. Et nous faire naviguer tribord amure, ce qui n’avait plus été le cas pendant longtemps ! En attendant, le pot au noir semble bien derrière nous, et aura été moins marqué que lors de notre descente trois ans plus tôt : moins de quatre heures de moteur. Il nous reste encore mille sept cents milles à courir avant Fort de France…
17 mars. Le vent est effectivement passé au nord-est : quinze nœuds soutenus qui ne sont pas là pour nous déplaire. Il y a bien cette barrière nuageuse à l’horizon, loin devant nous : on verra quand on y sera.
Et quand on y est, en début d’après-midi, il n’est plus temps de faire sa sieste. Le vent monte brutalement à plus de quarante nœuds. La mer fume. Kousk Eol dépasse les neuf nœuds, l’insouciant. Heureusement, l’équipage est maintenant rôdé : le génois est roulé pour n’en laisser qu’un quart, et le troisième ris est pris dans la grand-voile. Et nous avançons toujours à plus de huit nœuds. C’est un très gros grain, chargé de pluie : pas de restriction d’eau douce pour les douches !
Nous allons garder le troisième ris par prudence : l’horizon ne s’est pas vraiment débouché. Nous jouerons avec le génois en attendant d’y voire plus clair…
Va-t-on l’avoir, celui-ci?
Ben oui…
Et on découvre le pot aux roses : le pot au noir, c’est pas fini ! C’est juste que la ZCIT a pris ses aises et s’est étalée un peu plus que prévu. Pendant plusieurs heures, le vent ne faiblit pas en soufflant à plus de trente nœuds dans une mer un peu agitée, obligeant à barrer à la mimine pour soulager le pilote. La nuit s’annonce difficile… Il faudra être très prudent lors des déplacements dans le cockpit. Puis vers vingt heures, un semblant d’accalmie semble se dessiner : le vent retombe, façon de parler, en dessous de vingt-cinq nœuds et le pilote peut être remis à contribution. Et finalement, la nuit sera un peu agitée, mais sans problème majeur. Le soleil levant révèle un horizon à peu près dégagé…
Pêche du matin…
À peu près, parce que d’autres grains nous occuperons durant la journée. Et les jours suivants… Mais cette fois, l’alizé se maintient.
« Oh ! Vous avez vu ces trucs roses qui flottent sur l’eau ? » « Avec une trompe et de grandes oreilles ? » « Dis pas de conneries : regarde ! » « Ah ouais, on dirait des capotes rose violet, gonflées… ». Finalement, ce ne sont que des magnifiques physalies, toutes voiles dehors, qui se laissent déhaler par le vent, au gré des vagues… Ça nous change un peu des nombreux poissons-volants que Kousk Eol fait décoller régulièrement, au grand bonheur des quelques fous qui tournent autour de nous.
Oh la belle physalie!
Nous apercevons aussi de nombreux morceaux d’algues jaunâtres, comme des sargasses, qui dérivent et se prennent dans nos hameçons : voici qui va fournir un sérieux alibi pour ne pas manger de poisson !
Sargasses?
Lundi 20 mars. Hier soir, exercice peu concluant de récupération de GRIBs : le téléphone Iridium n’était plus reconnu par le PC… Une rapide investigation montre que le câble USB est le fautif : il fait tellement humide que la prise est oxydée. Un autre câble est installé, une petite giclée de WD40 dans la prise, et tout rentre dans l’ordre. Les prévisions montrent que le vent se renforce pour les prochaines quarante-huit heures : vingt-cinq à trente nœuds. Ce que nous aurons effectivement. Et la mer se forme. Du coup, ce qui restait du génois est complètement roulé et la trinquette reprend du service : avec trois ris dans la grand-voile, le bateau est souvent au-dessus de huit nœuds durant la nuit ! En plus, ça mouille ! Les vagues balaient3 régulièrement le pont, et s’engouffrent par les hublots mal fermés : « Pourtant, j’étais sûr de l’avoir fermé, celui-ci… ». La moyenne remonte, inversement proportionnelle au confort à bord… « Ah merde ! Le saladier avec le riz pour midi ! Il vient de voler à travers le carré ! Pourtant, j’avais prévu de le caler juste après mon café. ». Quelque chose me dit qu’on aura tout de même de la salade de riz tout à l’heure, avec juste un peu plus de piment que d’habitude… L’expérience ne se bâtit pas du jour au lendemain…
D’après vous, il vient de quel côté, le grain?
Point malgré tout positif : les batteries sont chargées à bloc, même après la nuit. Avec le vent et le soleil, éolienne et panneaux solaires se font une concurrence acharnée !
Dix-sept heures trente : ah tiens, c’est ballot, mais le pilote vient de lâcher. À nouveau, le bougre. Et à nouveau, c’est l’axe de la rotule du vérin qui a cassé, net. C’est louche : cet axe, neuf, aura duré trois semaines. Après examen, il semble que le trou taraudé dans lequel il était vissé, sur le secteur de barre, ait pris du jeu. Les à-coups du vérin lui auront été fatals à la longue. Les quarts de nuit se passeront barre à la main, à l’ancienne. Payou y gagne même ses galons de barreur émérite de nuit, cap sur les étoiles.
Au matin, Kousk Eol est mis à la cape pour pouvoir bloquer la barre et entreprendre une réparation. Un trou est percé dans le secteur de barre, et un nouvel axe est bricolé avec un boulon4. L’entretoise de la rotule est faite dans un bout de tuyau, et la bague de friction de l’axe découpée dans le bouchon d’une brique de jus de mangues brésiliennes… Nous croisons tous les doigts pour que la réparation tienne jusqu’à Fort de France, à plus de huit cents milles. Là, nous envisagerons quelque chose de plus définitif.
Moment d’intimité dévoilé, ou réparation du pilote?
Nous rallongeons involontairement la liste déjà longue des voiliers circumnavigateurs ayant eu au moins un problème de pilote. Après plus de trois ans sans problème, nous pensions un peu naïvement que ce souci n’était pas pour nous… La mécanique elle-même du pilote n’est pas en cause, construite sérieusement. Le gros point de faiblesse est l’axe de raccord du vérin au secteur de barre, sous-dimensionné. Par mer dure, les efforts sont très importants et l’axe finit par casser.
Mercredi 22 mars. Le pilote tient toujours… Le temps s’est largement amélioré : le ciel chargé de gros et lourds nuages à grain a fait place au soleil. Les grains ne sont plus que sporadiques, et moins violents. Nous retrouvons enfin les conditions normales de la route des alizés de l’Atlantique Nord vers les Antilles.
Midi : Cayenne est par notre travers au sud-ouest, à deux cents milles. Nous continuons à tracer notre route, cette fois, curieusement, avec des volontaires pour barrer : l’angoisse de perdre à nouveau le pilote doit certainement créer des vocations ! Nos dernières estimations nous donnent dans la baie du Marin au milieu de la journée de dimanche, à moins de sept cents milles.
Dix-sept heures trente : plus d’une centaine de dauphins vient tourner autour de nous, assurant le spectacle pendant un bon moment à la tombée du jour. C’était la bousculade à l’étrave. D’après notre guide, ce seraient des dauphins tachetés pantropicaux. Mais moi, ce que j’en dis… Nous n’en aurons pas vu beaucoup depuis le Cap. Même les noddis ne viennent plus chercher refuge pour la nuit.
Cent? Deux cent?
Vendredi 24 mars. De gros grains bien humides sont passés cette nuit, obligeant à prendre les quarts de l’intérieur du carré.
Hier soir, nous avons changé la dernière bouteille de gaz, la cinquième depuis le départ de Cape Town, soit une tous les huit ou neuf jours. Un record de consommation depuis le départ de Toulon il y a presque quatre ans ! Certains réflexes ou comportements sont loin d’être assimilés pour la vie à bord durant de longues traversées… Le point positif est que l’on a très bien mangé.
Encore quatre cents milles pour le Marin : l’arrivée dimanche dans la journée est compromise ! Surtout que le temps est très variable, et la mer, croisée, casse l’erre du bateau. Mais comme je ne suis rien qu’une mauvaise langue, la mer, à l’écoute, se calme un peu et du coup la moyenne remonte à plus de sept nœuds.
L’heure d’arrivée devient le sujet principal de conversation à bord. Il faut user de diplomatie pour calmer les velléités de mettre toute la toile, et expliquer pourquoi il faut même réduire de temps en temps : nous ne sommes pas en régate et il faut préserver le bateau, qui lui n’a pas terminé son tour… Le vent relativement faible et les allures portantes sur une houle désordonnée font qu’un voire deux ris dans la grand-voile permet de réduire les claquements sur les chariots de latte, par exemple. Cette longue traversée depuis le Cap est une découverte pour la moitié de l’équipage, apparemment très différente de ce qu’elle avait imaginé avant le départ. Il y en a au moins trois de contents d’arriver. Le quatrième aussi, tout bien réfléchi, quoique sans doute pas pour les mêmes raisons…
Samedi 25, 18h30 : après une journée plutôt rapide, apéritif spécial avant l’arrivée. On a prévu du lourd : toasts au pâté Le Hénaff, pour les nostalgiques de la voile bretonne, tartinés sur biscottes au blé complet du Brésil, avec son ti punch au rhum de St Hélène, rien de moins… L’anse du Marin est à moins de cent cinquante milles : jouable pour demain avant la nuit.
Dimanche 26. La hâte d’arriver se transforme en frénésie. Il faut absolument essayer toutes les combinaisons de voiles et de direction pour grappiller quelques dixièmes de nœuds et être au ponton à tout prix ce soir… Repartir comme Moitessier ? On peut arriver à le comprendre, sans excuser le geste.
Neuf heures trente : il reste une cinquantaine de milles. Nous prévoyons d’aller à la marina du Marin, au sud de Fort de France, où nous espérons trouver une place à quai. Pour l’instant, nous progressons plein vent arrière, génois tangonné, à peu près sur la route. Même si le pilote tient et rempli son rôle, les quelques passages de grain imposent une attention un peu soutenue.
Gros changement : le canal 16 de la VHF diffuse en français ! Et nous attrapons notre premier bulletin météo martiniquais, qui ne nous apprend pas grand-chose de nouveau : vent secteur ENE, trois à cinq Beaufort, creux d’environ deux mètres, grains dans l’après-midi, avec tendance orageuse. Bon, les grains, on s’en est tout de même pris trois ou quatre ce matin…
À midi, les côtes de Martinique sont en vue, sous les nuages.
Les derniers milles se feront en zigzagant entre les casiers à langoustes posés de façon un peu anarchique. Et vers dix-huit heures trente, nous prenons une bouée devant les pontons : l’encombrement en bateaux fait que nous différons au lendemain l’arrivée à quai. Nous sommes surpris par le nombre de bateaux, surtout des catamarans: il y en a des centaines au mouillage entre lesquels il faut slalomer en évitant les hauts fonds, et la marina annonce sept cent postes à quai. Mais le mouillage est très tranquille et la nuit sera bonne !
Mouillage du Marin, paradis des catamarans.
Nous aurons parcouru cinq mille sept cent quatre-vingt dix milles en quarante-trois jours depuis Simon’s Town, en comptant les arrêts.
__________________ 1– Mathias : tu n’as pas pu te retenir pour le suivant?
3– Les vagues balaient le pont, on essuie les grains, on se met à sec de toile, on mouille l’ancre, on lubrifie le vis de mulet : c’est aussi çà, la voile.
4– Un de ceux récupérés dans les « poubelles » des yachts de luxe à Papeete… La question « À quoi ça pourra bien servir ? » ne se pose pas sur un voilier.