Mardi 19 novembre 2019. Par un effet de son insondable allocentrisme, le tyran du bord skipper décide d’octroyer une journée de récupération à sa bande de bras cassés ses équipiers. Celle-ci sera donc consacrée à une visite du célèbre rocher. C’est ainsi que nous partons à pied vers Gibraltar dont la frontière se trouve à une quinzaine de minutes de la marina, avec contrôle des papiers, avant de s’arrêter pour laisser un avion atterrir, car il faut traverser la piste pour rejoindre la ville.
La visite commence par un petit détour dans une chandlery shop
pour acheter une nouvelle bosse pour le deuxième ris, puis nous nous
retrouvons dans Main Street, une succession de boutiques clinquantes,
sans gros intérêt.
On est bien chez les Grands Bretons…
Main Street.
Sympa Gibraltar: ils nous attendaient…
Nous nous dirigeons donc très rapidement vers la route qui mène
sur la crête sommitale, à un peu plus de quatre cents mètres.
Montée agréable par grand beau temps qui nous mènera tout d’abord
sur l’extrémité sud, à la batterie O’Hara qui domine le
détroit, et d’où la vue est grandiose sur Ceuta et Tanger. C’est
là que nous verrons nos premiers macaques, complètement
indifférents à nos commentaires et autres divagations.
La batterie O’Hara surplombant le détroit.
Maman et bébé macaques.
Ceuta et Tanger en face…
Station de pompiers…
Nous repartons ensuite vers le nord, et le point culminant où
arrive le téléphérique. La vue est toujours aussi magnifique, avec
la Méditerranée d’un côté, le détroit et sa porte sur
l’Atlantique de l’autre.
La baie d’Algesiras.
Ben oui, on a fait une pause avant de redescendre…
La redescente se fait par le raide escalier bien casse-pattes qui
ramène dans le centre de la ville.
Nous retrouvons la foule qui déambule entre les boutiques. 15
heures 30 : c’est peut-être un bon moment pour envisager de
grignoter un bout, et ingurgiter un peu de liquide. La température
n’est pas extrême, mais nous avons tout de même un peu transpiré.
La décision est prise de ne pas rentrer tout de suite au bateau,
mais de continuer notre tour de la ville en attendant l’heure du
repas : à l’unanimité, nous avons voté pour un fish’n’chips
que seuls les Britanniques savent noyer dans une graisse dégoulinante
et servir avec les frites non moins grasses et molles. Raté ;
le resto, une copie de pub très kitch, nous sert de copieuses
rations tout à fait mangeable, avec des frites croustillantes et des
crudités fort bienvenues. Même la bière y est très bonne, mais
là, on s’y attendait.
Puis le retour se fait dans la nuit : retraversée de la piste de l’aéroport, passage éclair de la frontière, et nous sommes de retour à bord. Surprise : nos copains de Kawaine sont finalement arrivés et sont amarrés presqu’à côté de nous.
D’autres voisins de ponton…
Mercredi 20 novembre. Après un petit déjeuner à
l’anglaise (muffins, bacon et œufs), nous prenons les GRIBs,
encore une fois, pour planifier notre traversée vers les Canaries.
Pas bon… Un vent fort d’ouest est prévu pour les deux
prochains jours… La situation s’améliore samedi, et la fenêtre
semble favorable jusqu’aux Canaries. Si la situation n’évolue
pas, nous partirons donc samedi…
Pour nous réconforter, Yan, dit Kancékonmélecodedé, nous
propose une ratatouille maison pour midi. Succulente comme
d’habitude.
Lundi 18 novembre
2019, 7 heures. Départ vers Gibraltar, que nous espérons
atteindre avant la tombée du jour…
Les contes de GRIBB1 Aujourd’hui est un autre jour, et les météorologues, ces poètes si mal connus qui savent mieux que quiconque narrer le cumulus, l’aquilon autant que l’affusion orageuse, nous ont préparé une belle fable de leur cru, qui commence ainsi : « Vent synoptique 2 à 4 nœuds, rafales de 15 à 20 nœuds. ». Bref, nous sommes en Méditerranée… D’ailleurs, les bulletins météo préviennent : « Les rafales peuvent être supérieures à 40 % au vent. ». 40 %?
Et Benalmadena dans tout ça ? Une marina bien équipée, dont les architectes ont dû s’inspirer de Port Grimaud, en nettement plus kitch. Un assemblage de meringues tarabiscotées envahi l’été par les touristes (un peu plus calme en cette saison).
Les superbes appartements de Benalmadena.
La toile anti-roulis
a été réparée et renforcée : les prochains coups de gîte
sont attendus de pied ferme !
Nos copains de
Kawaine, Dominique, Ghislaine et Julie, sont venus pour l’apéro
hier soir, déguster la quiche préparée par Yan : eux aussi
visent Gibraltar en fin de journée.
Le ciel est comme
les autres jours très dégagé, et permet d’admirer le bétonnage
massif de la côte, qui a dû être belle, il y a longtemps. Malaga,
Marbella… Des noms qui font rêver ? Oubliez ! Passez
votre chemin !
Après un démarrage prometteur sous voile, avec des pointes à 9 nœuds, c’est de nouveau Volvo qui prend le relais, trois heures après le départ. Et vers dix heures, le rocher de Gibraltar se profile au loin. Même les côtes d’Afrique, vers Ceuta.
Quelques fous de
Bassan nous font des démonstrations de plongeon.
Entre temps, le vent
est revenu, et les exercices de prise/lâché de ris s’enchaînent
ainsi que les bords plus ou moins carrés. Et le rocher est
maintenant à moins de vingt milles. Moment magique : nous
tirons un bord sur le bon cap, dix milles à neuf nœuds sur une mer
légèrement assagie.
Gibraltar, droit devant!
Et puis c’est la
Tour Victoria, le phare du sud de Gibraltar : on roule le génois
et la fin se fera au moteur. Le niveau d’excitation du bord atteint
des sommets.
Victoria Tower.
Appel à la Marina
Alcaidesa, juste au nord de Gibraltar : ils ont de la place pour
nous, et nous attendent. 17 heures 15 : amarrés devant la
capitainerie pour la paperasserie, puis 18 heures, à poste sur
catway. L’Atlantique est en vue…
Le trafic dans le détroit…
Deux semaines jour
pour depuis notre départ de Toulon : ce n’est certainement
pas un record de vitesse, mais côté coups de vent, nous avons été
gâtés !
Demain, journée
repos, et visite du rocher.
___________________________
1 De François, lui aussi poète au nez bouché dès potron-minet.
Suite à la publication de l’article sur les marins de Kousk Eol, parmi les disciples, un élan de protestation s’est fait sentir… Qui osera défier l’autorité suprême et écrire un tissu de bêtises sur notre cher cap’tain ??? Sans aller jusqu’à la mutinerie du Bounty, c’est une action syndicale menée par un collectif de marins en colère1 qui tentera de dresser un portrait le plus objectif possible de celui qu’on appelle Le Glaude.
Le parler « le
Glaude »…
Afin que tout le
monde se comprenne bien sur Kousk Eol, il est important de parler le
même langage… Comprenez bien, le même langage que le Glaude.
Certes, les bases grammaticales se rapprochent du langage marin
classique… En voici quelques exemples :
Prendre un
ris : consiste à réduire la grand-voile parce que le
liston est dans l’eau…
Liston :
Indicateur visuel de gîte qui, une fois immergé, fait penser qu’il
serait bon de prendre un ris…
Code
D : voile virtuelle dont les couleurs fait rêver les
filles. La légende dit que le Code D ne se déroule que lorsque le
vent est quasi nul…
Il ne s’agit pas
là de réécrire le dictionnaire des Glénans, mais plutôt de le
compléter avec les expressions courantes du bord.
Moi j’dis
ça j’dis rien : Forme d’ouverture au dialogue dont
l’issue est connue, c’est-à-dire que quelle que soit la
proposition opposée à celle du Glaude, elle ne sera pas retenue,
mais il ne vous en sera pas tenu rigueur. Ex : « Vous
voulez rester sous génois ? Moi j’mettrais la trinquette…
Mais… Moi j’dis ça j’dis rien… »
Sans vouloir
te commander : Dans l’action, cette petite expression
sans prétention pour le commun des mortels sera traduite à bord de
KE par « Fais ce que je te dis, et fissa ! ». Il va
de soi qu’il vaut mieux courir alors…
Vate
Fairfoutre : Cette expression, difficile à prononcer, est
à l’opposé de « Moi j’dis ça, j’dis rien ».
Lorsque le Glaude l’utilise, nous autres disciples pouvons alors
nous congratuler d’avoir enfin eu une bonne idée ! « Vate
Fairfoutre !!! » Le Glaude est d’accord ! Par
exemple, on peut renvoyer un ris ou dérouler du génois !
Va Fancùlo :
Forme d’acceptation identique à « Vate fairfoutre » !
Le Glaude jette l’éponge, on peut faire ce qu’on veut. Par
exemple, pêcher à la traîne à 8 nœuds…
Connard :
C’est qu’il a un cœur gros comme ça le Glaude. Il exprime
ainsi sa sympathie à l’égard de son entourage de marins. Il m’a
dit « Connard ! », ça veut dire qu’il m’aime
bien !
La
navigation
Une fois en mer,
notre cap’tain nous autorise à peu près tout. Il veillera
cependant à la préservation de quelques nobles principes : le
confort des passagers, et la performance sans faire souffrir son
valeureux Kousk Eol.
Point de
compétition ! On n’est pas là pour être les premiers !
C’est d’ailleurs en ces termes que le Glaude nous explique sa
philosophie de la voile paisible : « On n’est pas là
pour régater ! La seule chose que je ne supporte pas sur l’eau,
c’est d’avoir un autre bateau devant moi ! ». Il pense
d’ailleurs accrocher sur le tableau arrière un petit mot à
l’égard des bateaux dépassés : « Va Fancùlo ! » !
Pour le côté
marin, tous diront que c’est une encyclopédie à lui tout seul.
Son expérience semble infinie, et la richesse de ses récits de
navigation (dont nous sommes très friands) nous fait nous poser une
question : a-t-il un jour travaillé dans sa vie ???
Qui connaît l’âge du capitaine ?
Malgré son âge
avancé, il voit tout, il entend tout, et il sent tout ! Et
comme il connaît chaque boulon et chaque bout de ficelle de son
bateau, il peut analyser la moindre vibration, sortir la tête du
carré telle une marmotte à l’affût, et dire « Il faudrait
peut-être prendre un ris, sans vouloir te commander ! »
Le néophyte du bord
prendra alors sans tarder les dispositions qui s’imposent…
Un air de ressemblance ? Chercher les 7 erreurs.
Il arrive parfois
que le Glaude aie une petite absence… voire un oubli. Ce n’est
pas une erreur à bord de Kousk Eol… c’est une Glauderie, dont la
gravité est si infime qu’il ne s’en tiendra pas rigueur
lui-même… il évite ainsi les blâmes qu’il infligerait à ses
disciples…
Ses récits
Le soir venu, en
général au moment de la Tisane, des sujets aussi divers que variés
font l’objet de partage d’expérience… et comme on vous l’a
dit (faut suivre un peu !), le Glaude, il n’en manque pas !
Nous nous délectons ainsi d’anecdotes venues des quatre coins du
monde, qu’il semble avoir visité en entier (la légende
prétendrait qu’il en aurait fait le tour…). Le tout raconté
avec poésie et un humour type Breton (après tout, ce sont eux les
inventeurs du menhir ! ! !).
Le Glaude nous autorise à faire tout ce qu’on veut…
Nous voici dons
repus de notre nourriture spirituelle qui suffirait PRESQUE à nous
sustenter… alors que le Glaude, lui, ne se sustente que de petites
choses types cuisses de canard confites, jambon pata negra, ou
encore pommes de terres rissolé dans la graisse du malheureux
palmipède cité précédemment… Il s’abreuve aussi de
spiritualité à l’aide de saint joseph, médoc ou encore rioja…
Nourriture spirituelle…
On pourrait alors
croire que sa position de demi-dieu (half-god pour les anglophones)
le préserve des tâches les plus ingrates, mais c’est avec panache
qu’il souhaite se soustraire à la caste que lui confère son
grade. Aussi lance-t-il parfois « Je vais acheter des
tomates ! ». Nous le voyons alors revenir avec des choses
rouges… en général du vin et de la viande… Et les tomates ?
On verra la prochaine fois…
Je me dois de cesser
là mes agissements mutins, je pourrais être démasqué et débarqué
à la prochaine escale. Pas plus tard qu’il y a 10 minutes, un des
rameurs du bord a suggéré au Glaude de se débarrasser des
emmerdements du bord… Il parlait là de petits bricolages à
effectuer… La réponse du Glaude ne s’est pas fait attendre :
« Vas-y, saute à l’eau alors !!! » !
Voilà chers
lecteurs un portrait quelque peu satirique de notre cap’tain…
mais qu’il convient de ponctuer d’un proverbe qui prend ici tout
son sens : qui aime bien châtie bien !
Droit de réponse
La rédaction
étant très sensible au respect des règles les plus élémentaires
de la démocratie, un droit de réponse est ici accordé
à L – G— (nous ne citerons pas de nom pour respecter l’anonymat
du contestataire).
Tout ce fatras
d’inepties n’a absolument rien à voir avec la réalité, en
toute bonne foi objective, et les gens qui me connaissent vraiment
seront forcément d’accord. Mais moi je dis ça, je dis rien…
Non ? Vous êtes
sûrs ? Ah bon… Disons que c’est juste un peu exagéré
alors.
Non plus ? Très
en dessous de la réalité ? Vraiment ? Connards !
Je connais au moins
une personne à la réputation inattaquable qui dit du bien de le
Glaude. Qui ? Ah zut : j’ai bêtement oublié son nom…
Sans
vouloir vous commander, si vous pouviez éviter de publier ce
ramassis d’approximations douteuses… Vous comprenez, malgré les
apparences, ici extrêmement trompeuses, j’ai tout de même une
réputation à soigner. Quoi ? Il
ne faut pas que j’utilise
des mots qui véhiculeraient un concept qui m’échappe ? Va
Fancùlo !