Vendredi 25 juin 2021
Ça me navre un peu qu’il y ait encore des lecteurs trouvant un quelconque intérêt aux inepties accumulées sur ce blog. Mais bon… Après tout, il y a bien des téléspectateurs pour CNews…
Bref. Il est temps pour nous de repartir vers la destination finale de cette traversée démarrée le 12 mai à Pointe-à-Pitre…
Nous venons de passer deux jours à Barcelone, à la fois pour y déposer Richard qui reprenait le train pour Grenoble, et pour nous reposer un peu.
Barcelone est une ville extraordinaire sur bien des plans. C’est une cité très vivante, bien sûr avec les ramblas, mais aussi autour du quartier du port, entièrement rénové. L’architecture y est débridée, et pas seulement à cause de Gaudi. On ne compte pas les terrasses où s’arrêter pour une bière et des tapas. Bref, c’est une excellente étape.
Nous en profitons quand même pour bricoler un peu ; un voilier qui navigue s’use, et a besoin de soins réguliers… Nous vérifions les chariots de grand-voile ; rien n’a bougé depuis la réparation à Gibraltar ! Entre temps, le cardan de la cuisinière a décidé que lui aussi avait besoin d’un peu d’attention : un des axes avait rompu, et le deuxième, par pure jalousie, menaçait de faire pareil…
A 7h40, nous larguons les amarres du Porto Olimpic pour Toulon. La météo nous promet pétole pour la première partie du trajet, et ne se trompe pas : nous brûlons donc un peu de nos réserves de résidu organique fossile.
Mais sur le coup des onze heures, une petite brise, en partie thermique grâce à la proximité des côtes et un soleil radieux, permet de dérouler le génois. Et entendre l’eau bruire le long de la coque de Kousk Eol, dans vingt centimètres de vagues, à peine gîté et à plus de sept nœuds, est un plaisir dont on ne peut jamais se lasser…
La journée s’écoule tranquillement. En début de soirée, cri de Gianni et Bernard, depuis le cockpit : « Des baleines ! Des baleines ! ». En fait, un couple de globicéphales vient reprendre son souffle juste à l’arrière de Kousk Eol : ce sont vraiment de très gros dauphins…
Spécial A-S
Les dérapages verbeux du scribouillard de service qui ne rate jamais l’occasion de se la péter amènent parfois des commentaires plus ou moins critiques de la part de certaines lectrices1 quant à l’utilisation de vocables que l’on qualifie trop rapidement de désuets, voire pédants.
Pour ma défense, sans tomber dans un autocatégorème suspect, permettez-moi une prosopopée pour la liberté d’expression du coryphée du bord. Mes galimatias souvent abscons, mes lyriques hypotyposes, sont en général jaculatoires, de pures luthomictions, éventuellement un reflet de mon opsimathie.
Je pense humblement vous avoir convaincues par cet exposé suffisamment clair et limpide pour éviter une quelconque épanorthose. Non ?
Samedi 26
La nuit elle aussi est tranquille. Il faut bien faire un empannage, car le vent passe plus à l’ouest, ce qui nous ramène un peu mieux sur notre route. Mais bon, ça, on maîtrise.
Puis le matin, le vent vient carrément de face, en mollissant : vive Volvo à nouveau !
Nous ne sommes pas sûrs d’avoir une place à Toulon : la capitainerie nous a prévenus que le port était plein… On va tenter quand même. Comme solution de secours, nous pourrons toujours aller à Saint Mandrier, de l’autre côté de la rade, où le capitaine de port, une vieille connaissance, a promis de nous dépanner.
En attendant, Bernard, toujours sur sa promesse de sushis et autres sashimis, compte les leurres avalés et emportés par des poissons récalcitrants à l’idée de finir accomodés de wasabi…
Comme on ne peut compter sur lui pour se remplir la panse, il faut improviser à la cuisine. C’est une association italo-française qui s’y colle : « Si on faisait un risotto ? » « Pourquoi pas, mais avec du riz basmati importé du Pakistan2 ? Et des courgettes ? Et un œuf mollet sur le dessus ? » « Alors, par pur respect pour la la culture italienne, on va l’appeler Ersatz de Risotto à la Kousk Eol. ». Torchée qu’ils l’ont, la poêle, les morfales !
Ce samedi est un des premiers week-ends de sortie pour beaucoup de bateaux : le canal 16 de la VHF n’a pas beaucoup de repos. Et les PAN PAN3 s’enchaînent.
Puis sur le coup des 17 heures, le GSM se réveille à une quinzaine de milles de la côte, et un SMS nous apprend que finalement nous avons une place à la Vielle Darse… Alléluia4 !
Il est environ 20 heures, nous voici amarrés à la Vieille Darse. Bon d’accord, après presque 12 heures de moteur. Mais à la fois contents d’être arrivés et tristes que ce soit terminé.
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1 De certains lecteurs aussi, mais ayant une répulsion certaine pour l’écriture inclusive, il me fallait faire un choix.
2 Je rappelle incidemment pour les nombreux inculturés qui se seraient perdus devant ces inepties que le riz basmati (parfumé) vient de la région du Penjab en Inde, pas du Pakistan, ex très gros producteur jusqu’à une directive récente lui interdisant l’appellation… Et que le risotto se prépare avec du riso arborio per riosotto, en toute simplicité.
3 Appel au secours pour des problèmes ne mettant pas en danger des personnes : en général des pannes de carburant…
4 Ben alors, qu’est ce qu’il me prend, à moi ?